26 mai 2009

Soins de Support en Cancérologie et Médecines Complémentaires

COMMUNICATION
Retour d’expérience d’un atelier d’art-thérapie en service de cancérologie

Colloque

Soins de Support en Cancérologie et Médecines Complémentaires

1ère Journée Rencontre de l’UFR Santé, Médecine, Biologie Humaine

Samedi 16 Mai 2009
de 9h à 18h
Amphi 600 Illustration
UFR SMBH, 74 rue Marcel Cachin – Paris

Plublic : Médecins, Etudiants de second ou troisième cycle, Professionnels de Santé impliqués dans les soins en Cancérologie …

téléchargement programme du colloque, cliquer : programme-colloque-avicenne

Intervention d’Isabelle Gueudré, médiatrice artistique

Introduction par une présentation de l’art-thérapie

L’art-thérapie est considéré comme soin de support en cancérologie dans le plan cancer : mesure 42.

Idées forces de l’art-thérapie
L’art-thérapie propose, dans un cadre sécurisant un lieu d’expression et de création et favorise un processus de transformation.
Les médiations artistiques utilisées : musique, danse, arts plastiques, théâtre, marionnettes …
Ces supports permettent l’accès à un processus de création, au travers de mises en forme successives d’un mouvement, d’un geste, d’une couleur, etc. dans un champ où les mots sont parfois en échec. La création artistique accompagnée permet alors d’explorer ses potentiels dans le détour des empêchements, souffrances et limites.

L’art-thérapie s’appuie sur l’étincelle de créativité présente en chacun de nous.

L’art-thérapie invite la personne, en accompagnement individuel ou au sein d’un groupe, à entrer dans un espace de création où elle peut devenir auteur de réalisations personnelles, début d’un parcours pour être plus « acteur de sa vie ». En effet, la maladie confine souvent l’individu dans un « état de victime » et en rallumant cette étincelle créative un processus de transformation intérieure peut s’enclencher petit à petit.

Il n’y a pas besoin d’avoir une connaissance des pratiques artistiques pour participer, c’est accessible à chacun et chacune, l’idée est de partir de ce potentiel de créativité en soi et de le déployer.
L’acte artistique, quel qu’il soit : peinture, écriture, chant, danse… fait appel à l’imagination, à l’intuition, à la sensibilité, aux émotions et aux sentiments.
L’art-thérapie met en jeu toutes ses facultés, fait émerger des potentiels pour, tout ce qui empêche de s’épanouir et de vivre pleinement.
Un des points importants de l’art-thérapie est également de retrouver un espace intérieur où le jeu est présent.

Dispositif de l’atelier

-Prescription par la psychologue du service et par l’équipe soignante des patients susceptibles d’être intéressés par l’atelier. (Service d’hospitalisation et service ambulatoire).
-Rencontre avec les patients dans leurs chambres.
-Accueil des patients dans la salle.
-Rituel de début : installation, respiration, intériorisation.
-Phase de relaxation en musique avec visualisation.
-Lecture du conte
-Mise en mouvement et temps de création dansée en lien avec le conte.
-Rituel de clôture de l’atelier.

Objectifs de cet atelier

Dans un cadre bienveillant, créer un espace de détente, de bien être et de ressourcement aussi bien aux patients hospitalisés, qu’aux personnes en cures de chimiothérapie et accessibles également aux personnes en post-cure. Ceci à travers le mouvement dansé et le conte.

Le mouvement dansé

L’idée première de l’approche corporelle est de partir de là où en est la personne et de l’accompagner afin de lui permettre de re-contacter ses forces vives aussi petites soient-elles.
Sentir un souffle d’air, une onde, un mouvement si infime soit-il dans quelque chose qui peut paraître figé, pétrifié.
En effet, les personnes soignées pour un cancer arrivent la plupart du temps dans une attitude figée. C’est comme si la maladie les avait « cloué » sur place.
Les douleurs et les limites sont prises en compte pour permettre à la personne d’entrer en douceur dans un mouvement, à l’écoute de son corps.

Le processus thérapeutique de la danse est non verbal
La danse thérapie agit au niveau symbolique sans chercher à expliciter son sens.

L’expression corporelle permet de retrouver un corps où le mouvement et le jeu peuvent circuler librement…

-Par une écoute bienveillante de son corps, on peut le regarder sous un autre angle et l’animer “avec respect”. Le mouvement dansé amène à se réapproprier son corps, à découvrir ses différents points d’appui, à sentir l’énergie maintenue entre deux mouvements.

Il y a un changement de l’image corporelle quand le corps est en mouvement.

-Le « travail énergétique » qui découle de toute impulsion dans le corps à travers la danse amène à un mieux-être corporel même si c’est l’espace d’un moment (comme cette patiente qui portait un corset qui la faisait souffrir et qui pendant la relaxation ne « le sentait plus. »
-Entrer dans le mouvement remet en contact avec une certaine vitalité.
-Une autre notion importante est le plaisir de se laisser porter par la musique tout en explorant ce que le mouvement imprime dans le corps.

Le conte :

-Le conte est un langage universel qui, de par sa tradition orale, depuis la nuit des temps parle à chacun d’entre nous car il est porteur de sagesse.

-Les personnages des contes représentent des facettes de nous-mêmes qui vivent des péripéties pouvant s’assimiler à ce que chacun vit comme épreuve dans une vie.
Et en même temps, il y a une certaine distance puisque l’on dit : « il ou elle » en parlant des personnages du conte ou du héros qui s’aventurent dans des terres inconnues…
-Le patient peut se désidentifier de « la personne malade » à travers ce voyage dans le conte, pendant un moment il n’est plus seulement « un malade ».
-On retrouve dans presque tous les contes la même structure, à savoir que le héros ou l’héroïne du conte se met en quête d’un mieux-être. La personne soignée pour un cancer s’identifie, en le vivant dans le mouvement, à ce que vit ce héros et trouve des ressources en elle jusque-là ignorées.

Retour d’expérience :

Il est à noter que les personnes bénéficiant de l’atelier de façon ponctuelle, à savoir une ou deux fois, ressentent de façon générale un bien-être immédiat dans le sens d’une détente et d’un voyage dans l’imaginaire qui les amène dans un « autre espace » le temps de l’atelier.
Exemples :
Une femme qui avait un prurit important lié à un problème au foie ne se grattait jamais pendant la phase de relaxation.
Une autre femme âgée qui portait un corset qui la faisait souffrir n’a plus senti son corset pendant la relaxation.

Pour les personnes qui viennent régulièrement comme cette femme qui est venue une vingtaine de fois, on peut noter qu’un processus de « transformation » s’est mis en place progressivement.
Cette femme a accès maintenant de façon plus immédiate à la relaxation ; ce qui était alors pour elle très difficile pendant de nombreuses séances.
J’ai pu noté également que l’entrée dans le mouvement s’est fait progressivement de manière de plus en plus fluide.
Elle n’est plus dans une attitude figée et a un autre regard sur son corps ; elle élabore un autre rapport avec son corps qui a subi plusieurs interventions chirurgicales.

Pour d’autres, c’est une autre façon de « rebondir » après la maladie, d’avoir accès à une source d’énergie qu’elles pensaient avoir perdue.
C’est aussi s’approprier des processus qui permettent d’entrer dans la détente et/ ou la mise en mouvement.

C’est aussi remettre en mouvement l’imaginaire, l’impulsion d’aller vers…, de créer peu à peu une symbolisation personnelle dans son rapport à soi et au monde.

Quelques étapes dans le processus

les phases que j’ai observées dans le dispositif :

-1ère étape : Oser bouger, se mettre en mouvement, sortir d’une attitude corporelle figée.
-2ème étape : Regarder l’autre et se laisser regarder par l’autre.
-3ème étape : Bouger, puis se déplacer dans l’espace, explorer le volume de la pièce.
-4ème étape : Entrer en relation à travers le mouvement avec des partenaires.
-5ème étape : Se déployer, s’approprier l’espace de la salle.
Entrer dans un processus créatif où les mouvements dansés deviennent de plus en plus amples, fluides, habités.
-6ème étape : Processus de création de son propre conte écrit et chorégraphié. (Expérience à l’Embellie : lieu ressource qui accueille des femmes en traitement ou en post-traitement).

Conclusion

« Je me sens légère, ça circule à l’intérieur »
« C’est comme un lessivage de mon corps, il a été nettoyé »
« J’ai retrouvé de la substance dans mon corps »
« Quel bonheur de se laisser porter par la musique et de trouver sa propre danse ».
« Ces ateliers me permettent de rebondir »

Une des participantes définit l’atelier en disant : « Parler son corps » et « Vivre son corps ».
Parler sa maladie avec des mots est nécessaire, mais déverser des paroles peut être un puits sans fond.
Alors que « parler son corps » en mouvement permet de se réapproprier son corps autrement et sentir, intégrer qu’il y a un potentiel de vie dans ce corps en mouvement, dans ce corps dansant.

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